Pressemitteilung | 27/10/2020 - 10:30

Étude: Plus d’un poulet sur deux provenant des plus grands abattoirs de volaille en Europe contaminé par des agents pathogènes résistants aux antibiotiques

L’entreprise de volaille PHW est la plus fortement touchée, avec près de 60 % des échantillons de viande contaminés / Une étude commandée par Germanwatch et par des spécialistes de la médecine humaine analyse 165 échantillons de viande de poulet provenant des trois plus grands groupes de l’UE, achetés entre autres dans les supermarchés Lidl et Aldi en Allemagne, en France, en Pologne, aux Pays-Bas et en Espagne.
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Plus d’un échantillon de viande de poulet sur deux (51 %) provenant des trois plus grandes entreprises avicoles européennes est contaminé par une résistance à un, voire à plusieurs antibiotiques à la fois. Ce sont même plus d’un poulet sur trois (35 %) en moyenne qui introduisent dans la chaîne agroalimentaire des agents pathogènes résistants aux antibiotiques d’urgence. Ces chiffres alarmants sont les résultats d’une étude publiée actuellement et commandée conjointement par l’organisation de protection de l’environnement et des consommateurs Germanwatch et par l’association Ärzte gegen Massentierhaltung [Médecins contre l’élevage industriel]. L’étude a testé 165 échantillons de viande de poulet provenant des trois entreprises concernées, qui ont été achetés en Allemagne, en France, en Pologne, aux Pays-Bas et en Espagne.

Ce sont les échantillons du groupe avicole PHW qui ont présenté le taux de contamination le plus élevé : des agents pathogènes résistants aux antibiotiques ont été décelés dans 59 % des échantillons de viande de poulet. En d’autres termes, les taux de résistance détectés étaient encore plus élevés que lors des récentes enquêtes sur la viande de poulet menées par les autorités allemandes, où environ la moitié des échantillons étaient contaminés. Les marques Wiesenhof et Drobimex (Pologne), entre autres, font partie du groupe PHW, dont le siège est en Allemagne. Parmi les échantillons de viande de poulet de PHW, un sur quatre introduit le SARM dans la chaîne agroalimentaire, et un sur trois présente une résistance aux antibiotiques d’importance critique les plus prioritaires (CIA PP). Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), cette classe d’antibiotiques devrait être réservée aux humains, car ils sont nécessaires en cas d’urgence lorsque les antibiotiques classiques ne sont plus efficaces. La Commission européenne a l’intention de décider au cours des prochaines semaines si ces antibiotiques d’urgence avec priorité absolue pour les humains peuvent continuer à être utilisés dans l’agriculture industrielle.

Avec 57 % d’échantillons contaminés, la viande de poulet du groupe français LDC s’avère être à peine moins contaminée que la viande de PHW. Le groupe LDC comprend les marques Le Gaulois et Maître Coq. Avec un taux de 45 % d’échantillons présentant une résistance aux CIAs PP, le plus grand groupe de volailles de l’UE livre un argument solide démontrant la nécessité d’interdire dans l’élevage industriel cette classe d’antibiotiques, qui ont une importance cruciale pour les humains.

Un échantillon de viande de poulet sur trois provenant de l’entreprise de volaille Plukon (Pays-Bas) présente une résistance aux antibiotiques, et un sur quatre affiche également une résistance aux CIAs PP. Dans la présente comparaison, c’est la viande de Plukon qui a le taux le plus élevé d’agents pathogènes producteurs de BLSE ; ces agents peuvent présenter un risque pour les personnes âgées et pour les jeunes enfants, notamment lorsqu’ils sont malades. Les marques Stolle et Friki appartiennent au groupe Plukon.

33 000 personnes meurent chaque année en Europe parce que les antibiotiques ne sont plus efficaces. Les vétérinaires de l’UE utilisent plus d’antibiotiques pour les animaux que la médecine humaine ne le fait pour les personnes malades. L’utilisation massive d’antibiotiques, en particulier dans l’élevage industriel, est l’une des principales raisons de l’augmentation de la résistance, avec les infections dans les hôpitaux et l’utilisation inappropriée des antibiotiques. Les agents pathogènes résistants aux antibiotiques peuvent se transmettre lors de la préparation de la viande, entre autres, lorsqu’ils sont transportés sur des ustensiles de cuisine ou des légumes crus pendant la découpe, par exemple.

Reinhild Benning, experte en élevage chez Germanwatch, a déclaré : « Nous avons été surpris et choqués par les taux de résistance élevés détectés – surtout en ce qui concerne les CIAs PP. La résistance aux antibiotiques représente un risque énorme pour la santé humaine. En particulier dans le contexte de la pandémie de Covid-19, les personnes touchées ont souvent besoin d’antibiotiques efficaces pour lutter contre les maladies bactériennes concomitantes. La viande de volaille contaminée provenant de l’élevage intensif industriel peut contribuer à mettre en échec les derniers antibiotiques efficaces, qui sont de plus en plus souvent sans effet. Bruxelles accorde à l’industrie de la viande un traitement de faveur depuis trop longtemps déjà. Elle doit maintenant donner la priorité au sauvetage de vies humaines plutôt qu’à la production industrielle de viande bon marché. Les antibiotiques de dernier recours dans les usines d’animaux doivent être interdits. »

Sören Gatermann, directeur de recherche au Centre national de référence pour les pathogènes hospitaliers à Gram négatif (Bochum) a affirmé : « On ne s’attendait ni à un tel taux d’échantillons présentant une résistance aux fluoroquinolones ni à la présence de SARM – d’autant plus que les quinolones sont des antibiotiques importants, également dans le traitement d’infections graves chez les humains ».

D’après Imke Lührs, membre du conseil d’administration de l’association Ärzte gegen Massentierhaltung, « la Commission européenne peut et doit réserver aux humains les antibiotiques classés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme ayant la priorité la plus élevée. Dans le cas contraire, elle serait conjointement responsable si un nombre encore plus élevé de patients gravement malades devaient mourir suite à une infection par des germes résistants aux antibiotiques. Nous, médecins, sommes dépendants des CIAs PP dans de nombreux domaines de la médecine moderne, tels que le traitement des tumeurs, les transplantations, les soins aux prématurés, les opérations majeures et les accidents graves. Le fait que les CIAs PP servent au fonctionnement du système d’élevage industriel est intolérable. La législation pour la protection des animaux doit être efficace, et le recours aux CIAs PP dans les étables doit être interdit. »

Alors que, selon les autorités européennes, la consommation d’antibiotiques par les vétérinaires diminue dans certains pays de l’UE, comme l’Allemagne, les taux de résistance ne baissent pas de manière uniforme. D’après le ministère fédéral de l’Agriculture, la consommation d’antibiotiques pour les poulets de chair en Allemagne n’a de toute façon diminué que de 0,9 % entre 2014 et 2017. Les taux de résistance élevés sont considérés comme une indication que les animaux, et donc leur flore microbienne sont continuellement confrontés aux antibiotiques.

Germanwatch et Ärzte gegen Massentierhaltung demandent à la Commission européenne d’interdire l’utilisation dangereuse des CIAs PP. Germanwatch conseille aux consommatrices et consommateurs d’acheter uniquement de la viande de volaille issue de la production biologique ou de la viande provenant directement de l’abattage à la ferme.


À propos de l’étude : Un total de 165 échantillons de viande de poulet ont été examinés au Centre national de référence pour les pathogènes hospitaliers à Gram négatif (Bochum). Ils proviennent des trois plus grandes entreprises de volaille de l’UE : PHW, le groupe français LDC et le groupe néerlandais Plukon. Les échantillons ont été achetés dans des supermarchés Lidl et Aldi en Pologne, en Allemagne, en France et en Espagne, ou directement auprès des abattoirs concernés en Allemagne et aux Pays-Bas.